Aux échecs, la structure de pions (parfois connue sous le nom de squelette de pions) est la configuration des pions sur l'échiquier. Les pions étant les pièces les moins mobiles, la structure de pions est relativement statique, et détermine fortement la nature stratégique de la position.
Philidor fut le premier à reconnaître l'importance de la structure de pions. Avant lui, les pions étaient considérés comme une gêne dans le développement des pièces, que l'on pouvait sacrifier pour gagner ne serait-ce qu'un tempo.
Les faiblesses dans la structure de pion, comme un pion isolé, des pions doublés ou un pion arriéré et des trous, sont habituellement permanentes une fois créées. On doit donc prendre soin de les éviter (mais il existe des exceptions, comme le trou de Bolesvalsky, voir plus bas). En l'absence de ces faiblesses structurelles, il n'est pas possible de classer les structures comme bonnes ou mauvaises, beaucoup dépendra de la position des pièces. Cependant, une formation de pions détermine de façon importante la stratégie générale, indépendamment de l'ouverture qui l'a fait naître. Les formations de pions symétriques autour d'une ligne verticale (comme la chaîne e5 ou la chaîne d5) peuvent être trompeusement similaires, mais avoir des caractéristiques complètement différentes en raison de la propension au petit roque.
Des transpositions entre structures de pions arrivent fréquemment, telles l*'isolani* en pions pendants et réciproquement. De telles transpositions doivent être considérées avec attention et marquent un infléchissement dans la stratégie du jeu.
Dans son livre Pawn structure chess, Andrew Soltis classe les principales formations en seize catégories détaillées plus bas. Pour que la structure tombe dans l'une ou l'autre catégorie, il n'est pas indispensable que les pions soient exactement sur les mêmes cases, seulement que la nature du jeu et les thèmes essentiels soient les mêmes. Ce sont les pions du centre qui ont le plus d'influence sur la nature du jeu.
Les structures avec des attaques mutuelles de pion sont dites « tendues ». Elles sont d'ordinaire instables et ont tendance à transposer dans une structure stable avec une poussée de pion ou un échange. Le jeu est souvent centré autour de la transition dans des circonstances favorables. Par exemple, dans le gambit dame refusé, les Noirs attendent que les Blancs développent leur fou f1 pour effectuer la capture d5xc4, transposant dans une formation slave (voir plus bas)
Il n'est pas prudent pour les Blancs d'échanger une pièce en c6 en permettant la recapture bxc6, parce que la phalange de pions centraux noirs devient très forte.
L'étau de Maróczy, a une redoutable réputation. On pensait autrefois que permettre l'étau donnait toujours aux Blancs un avantage significatif. En effet, si les Noirs ne réalisent pas rapidement une poussée libératoire, les pièces vont suffoquer. Cependant, la formation prend du temps à mettre en place et limite l'activité du fou roi blanc, ce qui peut donner du temps aux Noirs pour la poussée.
L'idée que les Noirs créent délibérément un trou en d5 et doivent ensuite se battre pour l'égalité est paradoxale. Le jeu est axé sur la case d5 : les Noirs doivent jouer très précisément ou les Blancs vont placer un cavalier à demeure en d5 et obtenir un avantage de position important. Les Noirs égalisent presque toujours s'ils peuvent réaliser la poussée d6-d5, et peuvent même obtenir un jeu légèrement meilleur. Les Noirs ont deux options pour le fou dame : e6 ou b7 (après a7-a6 et b7-b5). Contrairement à l'habitude dans les positions ouvertes, les fous ont tendance à être inférieurs aux cavaliers en raison de l'extrême importance de la case d5 : les Blancs échangent fréquemment Fg5xf6 et les Noirs préfèrent abandonner leur fou dame plutôt qu'un cavalier pour échanger le cavalier blanc qui parviendrait en d5.
Quand les blancs choisissent le grand roque, les Noirs retardent le roque car le roi est en sécurité au centre.
La chaîne survient dans un nombre d'ouvertures variées, mais le plus couramment dans les variantes de la défense est-indienne qui ont fait l'objet d'analyses poussées. Le thème est une course pour une percée sur les flancs opposés, les Noirs doivent tenter une attaque rapide sur l'aile roi avant que les pièces blanches ne pénètrent de façon dévastatrice par la colonne c. On pensait que cette formation était favorable aux Blancs jusqu'à une partie d'école entre Taimanov et Najdorf au Tournoi des candidats de Zurich 1953, dans laquelle les Noirs introduisent la manœuvre Tf8-f7, Fg7-f8, Tf7-g7. Quand la formation est issue d'une partie espagnole, le jeu est beaucoup plus lent, le temps est de moindre importance et est employé à des manœuvres de pièces de part et d'autre, les Noirs se préoccupant de la poussée c7-c6 et les Blancs tentant habituellement un jeu sur l'aile roi avec la poussée f2-f4.
En raison de l'avantage d'espace et de développement des Blancs sur l'aile roi, les Noirs doivent créer du contre-jeu pour éviter de se faire mater. Les débutant se font souvent surprendre par un sacrifice de fou en h7. L'attaque de la tête de la chaîne de pions avec f7-f6 arrive aussi fréquemment que l'attaque par la base, parce qu'il est plus difficile aux Blancs de défendre la tête de la chaîne qu'avec la chaîne d5. En réponse à exf6, les Noirs acceptent le pion arriéré e6 en échange de la libération de leur position (l'ouverture de la diagonale b8-h2 et la colonne semi-ouverte) et la possibilité d'une poussée e6-e5 future. Si les Blancs échangent d4xc5, la formation est dite en coin. Les Blancs obtiennent un avant-poste en d4 et la possibilité d'exploiter les cases noires tandis que les Noirs ont un pion avancé en e5 comme cible.
La formation a été introduite par Vsevolod Rauzer dans la partie espagnole. Elle peut aussi survenir avec les couleurs inversées dans la même ouverture, bien que cela soit rare.
On considère qu'elle donne aux Noirs d'excellentes chances, car le trou d6 est bien moins grave que d4 chez les Blancs. Si le fou roi des Noirs est en fianchetto, il est courant de le voir revenir sur sa case initiale f8 pour contrôler les cases vitales c5 et d6, ou pour échanger le fou dame des Blancs qui défend le trou.
La formation Rauzer est souvent mal jugée par les novices. Dans le diagramme de gauche, il semble que les Blancs aient un avantage de développement tandis que la position des Noirs est remplie de trous. En réalité, les Noirs sont beaucoup mieux, parce que les Blancs n'ont pas de possibilité réelle d'améliorer leur position tandis que les Noirs peuvent exploiter la case d4.
Le mur est encore une autre structure qui laisse les Noirs avec un pion d faible, mais empêche aux Blancs de contrôler le centre et donne aux Noirs un jeu de pièces actif et l'opportunité de jouer sur l'un ou l'autre flanc.
L'isolani aboutit à un jeu vif autour de la case d5. Si les Noirs peuvent bloquer le pion, leurs forces positionnelles et les menaces d'échanges leur donnent l'avantage. Sinon, la menace d4-d5 est permanente, et l'isolani peut parfois être sacrifié pour permettre aux pièces blanches une attaque dévastatrice. Kasparov est réputé pour ce sacrifice spéculatif d4-d5.
Comme l'isolani, les pions pendants sont une faiblesse structurelle et ne doivent pas être créés à moins qu'ils soient compensés par une meilleure position des pièces. Les Noirs vont tenter de forcer une avancée de pion adverse. Si les Noirs peuvent créer un blocus permanent, la partie est gagnée positionnellement. D'autre part, les Blancs tentent de maintenir les pions tels quels et de lancer une attaque sur l'aile roi, exploitant leur meilleur contrôle du centre. Il existe d'autres thèmes pour les Blancs à base de possibilités tactiques et d'ouverture de ligne au centre.
Les joueurs doivent réfléchir soigneusement à la façon dont ils recapturent sur les cases e4/e5, car cela brise la symétrie de la structure et crée des subtilités stratégiques.